Les derniers mois de la guerre de Sécession, une période pendant laquelle le président Abraham Lincoln a tout mis en œuvre pour abolir l’esclavage et ramener les États confédérés dans l’Union, font partie des moments les plus importants de l’histoire des États-Unis. Heureusement, il y a maintenant un film, gracieuseté du légendaire Steven Spielberg, pour donner une vie cinématographique au difficile combat du 16e président américain. Les faits bruts ne pourraient être plus frappants.
Avec «Lincoln», une adaptation de la biographie «Team of Rivals: The Political Genius of Abraham Lincoln» de Doris Kearns Goodwin, Steven Spielberg modère son ambition habituelle dans les films destinés au grand public (le plus récent exemple étant «War Horse», un mélodrame de la Première Guerre mondiale sorti en 2011) pour créer un portrait intimiste d’une personnalité politique exceptionnelle. Pour atteindre cet objectif, le scénariste Tony Kushner («Munich» et «Angels in America») construit le film comme une pièce de théâtre, en s’appuyant sur la présence apaisante du caméléon Daniel Day-Lewis pour insuffler de la vie à l’élocution poétique de Lincoln.
Le président affronte de nombreux obstacles dans sa quête pour libérer les esclaves et mettre fin à la guerre; Tony Kushner et Steven Spielberg tissent une toile de personnages qui le tirent dans des directions opposées (ce qui représente fidèlement les événements historiques réels). De nos jours, Lincoln est tenu en haute estime et considéré comme une personnalité inspirante. Spielberg nous montre pourquoi.
L’histoire est simple, mais Tony Kushner ne se gêne pas pour incorporer de longs passages de discussions politiques afin de nous montrer l’importance de la tâche de Lincoln. C’est un matériel dense, embelli par le talent du scénariste pour les dialogues. Comme le laisse entendre la bande-annonce, Daniel Day-Lewis est flamboyant, mais fait preuve d’une retenue absolue. Cela met d’autant plus en évidence ses éruptions subites. Spielberg établit le rythme avec une main d’expert derrière la caméra.
Le film occulte cependant le monde à l’extérieur des bureaux de la Maison-Blanche et du Congrès — on entend beaucoup parler de la guerre, mais on ne la voit pas beaucoup. Les scènes où l’on voit Lincoln sur les champs de bataille recouverts de corps de soldats sont chargées d’émotion, mais cette émotion ne nous atteint pas vraiment.
Si l’histoire ne fait pas partie de vos intérêts, «Lincoln» ne vous stimulera pas. Il n’est pas nécessaire de faire des lectures approfondies avant d’aller voir le film, mais les conversations se déroulent à la vitesse de l’éclair et personne ne vous prendra par la main pour tout vous expliquer. C’est un changement de rythme pour Spielberg, et un changement bienvenu. Avec tout le prestige qui accompagne le fait d’être l’œuvre du plus grand réalisateur de tous temps, «Lincoln» captive les sens et comporte assez de qualités pour en faire une expérience exaltante.