Malgré ses airs de suite spirituelle d’«Alice au pays des merveilles (2010), «Oz, le magnifique», qui se veut l’antépisode du «Magicien d’Oz», fait de la magie au grand écran. Le réalisateur Sam Raimi («Spider-Man») corrige toutes les fautes d’Alice, gonfle le décor numérique éblouissant avec des couleurs éclatantes et nourrit son aventure de conte de fées d’une bonne dose d’âme. Comme l’a fait «Hugo» (2011) avec la naissance du cinéma, Sam Raimi transforme «Oz» en lettre d’amour adressée à la magie à l’ancienne, avec des couleurs en procédé Technicolor et la même approche fantaisiste qui a fait du film original de 1939 un grand classique. «Alice au pays des merveilles» a peut-être récolté un milliard de dollars au box office, mais c’est Oz qui incarne la réussite de tout ce qui est fantasque, loufoque et totalement transcendant.
James Franco incarne Oscar Diggs, l’homme qui finit par devenir le «Magicien» que nous connaissons. Mais il est d’abord et avant tout un magicien de l’époque de la Grande Dépression et des tempêtes de poussière, toujours prêt à profiter même de ses plus proches amis pour s’assurer que sa vie se déroule comme il le veut. Pour lui donner une leçon, les forces de l’univers l’aspirent dans une tornade qui le conduit directement au pays d’Oz. Oscar croise le chemin de Theodora (Mila Kunis), une sorcière qui pense qu’il est un sorcier prophétique envoyé pour sauver le pays d’Oz de la sorcière de l’Ouest. Et c’est ainsi que commence leur grand voyage à travers le pays d’Oz — et la plus grande escroquerie d’Oscar jusque-là.
Alors que le «Sorcier» accepte le défi de neutraliser la sorcière de l’Ouest après avoir appris l’existence des trésors de la Cité d’Émeraude, Oscar rencontre les vraies vedettes du spectacle créé par Sam Raimi. Rachel Weisz s’amuse dans la peau d’Evanora, sorcière peureuse et sœur de Theodora. La sorcière Glinda, incarnée par Michelle Williams, reproduit l’innocence et l’élégance de la Glinda de 1939, mais avec plus d’intelligence. Elle est peut-être la plus gentille de toutes les sorcières d’Oz, mais mettez-la en colère et elle vous jettera un sort. Une bonne partie d’«Oz, le magnifique» se consacre à explorer le vaste monde que le réalisateur a créé : la Cité d’Émeraude, le pays Munchkin et la China Town (faite exclusivement de plats en porcelaine chinoise) ravagée par les singes volants de la sorcière de l’Ouest. Et ça fonctionne en grande partie grâce aux personnages qui portent ces univers tout au long du film. Même Zach Braff, dans la peau d’un singe qui parle, apporte la touche comique dont le film a besoin (ce qui offre certaines des blagues en 3D les plus réussies du film).
Le seul élément qui tombe à plat dans «Oz» est James Franco. Et son échec est total, comme une maison emportée par un tourbillon qui retombe durement sur Terre. Oscar est censé être un homme en quête de rédemption, un égocentrique qui détruit tous ceux qui l’entourent. James Franco remplit ses obligations… mais on n’a pas l’impression de voir un personnage. L’acteur semble être bien conscient du vide qui l’entoure. Il a l’air idiot plutôt que théâtral. Son sourire peu convaincant crée une distance entre lui et ses covedettes, qu’elles soient réelles ou numériques.
Mais même l’approche décontractée de James Franco ne peut entacher la vision inspirée de Sam Raimi, qui exprime toutes ses excentricités de réalisateur dans les mouvements affolés de la caméra, les angles inverses audacieux et un instinct qui rend «Oz» un peu effrayant (ne vous inquiétez pas, les enfants : ce film n’a rien à voir avec «Evil Dead»). Le film de Sam Raimi rend hommage aux incarnations passées du «Magicien d’Oz», notamment avec une mélodie qui évoque «Lollipop King» du compositeur Danny Elfman, mais reste tout de même innovateur. Le réalisateur affronte James Franco à chaque virage de la route en briques jaunes, orchestrant des séquences d’action, des rencontres fantaisistes et même un numéro musical dans l’espoir de noyer Oscar dans l’imagination. Les pouvoirs combinés de Rachel Weisz, de Michelle Williams et de Mila Kunis compensent le manque de charisme de la vedette principale. Pourrait-on garder seulement ces trois femmes pour la suite ?